samedi 4 juillet 2009

Contrer les maladies fongiques

L'abondance de précipitations sur le sud du Québec ces derniers temps commence à causer bien des ennuis à certaines cultures affectées par des maladies fongiques dont le mildiou, l'oïdium, la pourriture grise et la mosaïque des légumes. Le site Jardin à manger consacre une page à ces vilaines maladies causées par les champignons et, selon la nature de l'infection, propose des solutions biologiques (purin d'ortie, décoctions d'ail ou de prêle, etc.).

J'entends déjà dire « Oui, mais tu produis en serre... il ne pleut pas dans une serre... » C'est convenu, mais si des conditions d'humidité prévalent à l'extérieur, sans période d'assèchement, les cultures en serre risquent d'être affectées par des maladies fongiques.

Pour ma part, j'obtiens d'excellents résultats avec le « thé de compost aéré », qui consiste à oxygéner un mélange eau/compost durant la macération pour stimuler la vie bactérienne aérobique.  Les bactéries aérobiques dévoreront les bactéries anaérobiques qui peuvent être nuisibles aux plantes. En plus de servir d'amendement de sol comme le thé de compost simple, la version aérée constitue un puissant fongicide et antibactérien qui s'avère utile par temps humide.

Remarque : Je produis en mode biologique, donc les produits cités plus bas sont certifiés bio.  Je tiens à préciser n'avoir aucun lien commercial ou autre avec ces fabricants, ni leurs distributeurs, outre le fait que j'utilise leurs produits.

Matériel

Il faut évidemment du compost «mûr».  Évitez les composts trop jeunes ou ceux contenant du fumier qui n'aurait pas eu le temps de fermenter et de se décomposer entièrement.  Pour ma part j'utilise le Biomax d'un NPK 1,8/1,8/1,8.

Il vous faudra aussi un contenant approprié.  J'utilise un seau blanc en plastique de 22 litres (5 gallons) semblable à ceux qu'on trouve dans les quincailleries ou chez les marchands de peinture.  Méfiez-vous des seaux usagés qui auraient pu contenir des substances chimiques ou toxiques.  En achetant un seau neuf, vous aurez l'esprit en paix.

L'aération du mélange se fait à l'aide d'une petite pompe à air qui sert à oxygéner les aquariums et qu'on trouve dans les animaleries.  Vous aurez aussi besoin d'une pierre d'aération rectangulaire, et d'une certaine longueur (selon votre installation) de tube flexible pour relier la pierre d'aération à la pompe.

Prévoyez aussi un outil (simple morceau de bois) pour brasser le mélange.

Vous devrez aussi avoir à portée de la main une substance sucrée facilement soluble dans l'eau comme de la mélasse.  J'utilise de la mélasse noire biologique.

Composition

Commencez par remplir le seau d'eau aux trois quarts de sa capacité.  L'eau de pluie ou de source est recommandée.  Si l'eau du robinet est traitée (chlore, fluor, etc.), je vous suggère de faire fonctionner l'aérateur durant 24 heures avant d'y ajouter le compost de manière à permettre l'évaporation des produits chimiques que l'eau pourrait contenir.

Les proportions peuvent varier selon les recettes et leurs auteurs, mais j'utilise un litre de compost que je verse dans l'eau en brassant le tout vigoureusement pour que les agrégats se détachent.  Si ce n'est déjà fait, actionnez l'aérateur.

Ajoutez ensuite un quart de tasse de mélasse noire.  Je vous recommande de la diluer d'abord dans de l'eau chaude, elle sera plus facile à intégrer à votre mixture.  Le rôle de la mélasse est de nourrir les bactéries aérobiques pour éviter qu'elles se détruisent entre elles.  Elle contient aussi des oligo-éléments utiles aux plantes (calcium, fer, magnésium, etc.) qui se retrouveront dans votre thé, donc dans votre sol.

Il importe de brasser votre mélange au moins deux fois par jour en remuant bien le fond du seau.  À température ambiante, votre thé sera prêt en 3 à 5 jours.  Si la température ambiante est trop élevée (exposition du seau au soleil, fabrication dans une serre, etc.), soit la maturation prend plus de temps, soit elle échoue complètement.

Le signe le plus tangible pour déterminer si votre thé est prêt est la formation de grosses bulles en surface.  Elles peuvent atteindre plusieurs centimètres.  C'est d'ailleurs pourquoi il ne faut remplir le seau qu'aux trois quarts.  À ce stade-ci, il est prêt à l'utilisation.   Il se maintiendra encore quelques jours, selon que vous y ajoutiez une très légère dose de mélasse pour continuer d'alimenter les bactéries. Un compost mûr dégage très peu d'odeur, le processus peut donc s'effectuer sans problème à l'intérieur ou sur un balcon.  Si votre mixture dégage une odeur désagréable, c'est probablement parce que le compost utilisé n'était pas mûr.  Il ne faut pas utiliser un thé qui dégage une odeur désagréable, il pourrait davantage nuire à vos plantes que les aider.

Utilisation

Une fois votre thé de compost arrivé à maturation, il sera prêt à vaporiser sur les plants atteints de champignons. Pour ce qui est de la vaporisation foliaire, il faudra filtrer le thé avant de le verser dans un vaporisateur, car les particules en suspension risqueraient de bloquer la buse du vaporisateur.  Je déconseille la passoire, tout comme la mousseline à fromage, car elles ne sont pas assez fines.  Utilisez plutôt un bas de nylon.  Utilisez une solution d'une partie de thé pour quatre parties d'eau, et 15 ml de savon biodégradable par litre comme agent surfactif pour une meilleure adhésion à la surface des feuilles.  Si la vaporisation vise à détruire des fongus ou à contrer des infections bactériennes, il importe de vaporiser les feuilles des deux côtés.

Pour la vaporisation foliaire, on peut se procurer un bon vaporisateur à pression si on a beaucoup de plantes à traiter, sinon on peut réutiliser un vaporisateur de nettoyant bio.

Vous pourrez aussi rincer votre matériau de filtrage, et utiliser l'eau de rinçage comme décrit ci-haut pour les résidus de fond de seau.

Autres considérations

Les compositions de thés de compost sont multiples, il est possible de faire nombre d'expériences selon les ratios NPK des composts disponibles.

Par exemple, constatant une carence en azote de certains plants en serre, j'ai préparé un thé de compost selon la recette décrite ci-haut, sauf que j'ai utilisé 500 ml de compost de fumier de chauve-souris (guano) de marque Acadie (NPK de 12/2/2, forte teneur en azote).  L'effet correctif s'est fait sentir trois jours après l'application (fertigation et vaporisation).

Un avantage du thé de compost bio c'est, contrairement aux préparations chimiques «dures», la quasi-impossibilité de surdose.  Il convient toutefois de respecter la consigne pour sols secs ou humides énoncée plus haut.

Sur des produits comestibles, il est recommandé de ne pas vaporiser à moins de sept jours de la date prévue pour la récolte.  

Si vous n'avez pas besoin d'une telle quantité de thé, je ne vous recommande pas de tenter de produire du thé en plus petite quantité, le calcul des proportions devient difficile et il semble falloir une masse critique pour le développement du thé.  

Comme on ne peut entreposer le thé de compost plus de 24 heures dans un contenant fermé (anaérobie), pourquoi ne pas le partager avec des voisins ou des amis? Ils vous en seront reconnaissants.  Il peut aussi fort bien servir d'engrais pour les plantes d'intérieur.  

Enfin, une fois l'opération terminée, lavez bien votre matériel avant de le ranger ou d'entreprendre la fabrication d'un autre lot de thé afin d'éviter toute contamination.

Bonne culture.

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